ENQUÊTE
Vélos et trottinettes électriques

Le recyclage des batteries se met en place

Les vélos et trottinettes électriques facilitent les déplacements quotidiens tout en favorisant une mobilité douce et écologique. Mais lorsqu’elle arrive en fin de vie, la batterie au lithium se mue en un déchet très polluant qu’il convient de recycler. La filière, lancée pour les vélos électriques en 2018, a recyclé 62 tonnes de batteries en 2019 et s’attend à 100 tonnes en 2020. Et le circuit de collecte et de recyclage des batteries des trottinettes électriques est désormais en place. Décryptage.

Les batteries des vélos à assistance électriques (VAE) et des trottinettes électriques en ont dans le coffre, mais elles sont périssables. Lorsqu’elles sont neuves, les fabricants garantissent un nombre de cycles de charge (autour de 500 cycles en général), soit une durée de vie de 5 à 6 ans dans le cadre d’un usage modéré. Au-delà, leurs performances peuvent commencer à se dégrader, jusqu’au jour où, épuisées, elles doivent être remplacées. Et surtout recyclées ! Car les batteries de vélos et de trottinettes électriques sont composées de nombreux matériaux polluants et dangereux, de la coque en plastique aux cellules pleines d’éléments chimiques (nickel, cobalt, manganèse) et des câbles au circuit électronique BMS qui contrôle leur bon fonctionnement (le BMS, « Battery Management System », est le cerveau de la batterie : il prévient les surcharges, gère la tension, contrôle la température, etc.).

Avec la maturité du marché des vélos électriques, la question du recyclage des batteries devient cruciale. Balbutiantes en 2007, les ventes ont décollé au début des années 2010 et la croissance ne faiblit pas. Les 340 000 vélos électriques vendus en 2018 s’ajoutent au million d’autres vendus depuis 10 ans, dont les batteries arrivent pour certaines à bout de souffle. Le phénomène des trottinettes électriques est plus récent, mais tout aussi vertigineux. D’après la FPMM (Fédération des professionnels de la micro-mobilité), plus de 121 000 engins électriques (trottinettes et monoroues) ont été vendus en 2016, 402 000 en 2017 et 575 000 en 2018. Les batteries des précurseurs arrivent, elles aussi, à l’étape recyclage. Comme celles des trottinettes des flottes de loueurs (Lime, Bird…), dont la durée de vie moyenne est de 3 à 6 mois. La FPMM estime que 200 000 batteries de trottinettes devront être recyclées en 2020. Il y en aura 37 500 environ du côté des vélos électriques.

La collecte passe par les vendeurs

Bonne nouvelle, les professionnels sont aujourd’hui en ordre de marche pour les accueillir. La FPMM s’est récemment associée aux éco-organismes Screlec et Ecologic pour organiser le recyclage des batteries de trottinettes électriques, sur un modèle similaire qui avait vu l’Union Sport & Cycle (Union des entreprises de la filière du sport, des loisirs, du cycle et de la mobilité active) s’associer à Corepile fin 2017 pour les batteries des VAE. Les batteries de ces engins étant considérées comme des produits industriels, il appartient à tous ceux qui les mettent sur le marché d’organiser la collecte, le tri et le recyclage. Il était donc temps que les filières émergent. « La difficulté a consisté à trouver une équation financière qui satisfasse les fabricants de trottinettes et les éco-organismes. Ces derniers sont en effet contraints de facturer chaque batterie à recycler, puisqu’ils ne perçoivent pas de financement pour les batteries industrielles », décrypte Jocelyn Loumeto, le délégué général de la FPMM. Screlec et Corepile disposent de l’agrément de l’État pour gérer les batteries portables, et perçoivent à ce titre l’écocontribution payée par les consommateurs quand ils achètent un nouveau smartphone. Mais le recyclage des batteries industrielles constitue une activité périphérique, sans agrément, et donc sans financement. Ces éco-organismes sont pourtant les mieux placés pour recycler les batteries de trottinettes et de vélos électriques, en réalité plus proches des batteries portables que des batteries industrielles (les producteurs de batteries industrielles ont plutôt intégré leur recyclage individuellement, avec leurs autres opérations de maintenance).

Au final, le fabricant ou le vendeur de vélo doit payer 5 € par batterie envoyée en recyclage. Pour une trottinette électrique, le tarif est de 3,65 €. Il comprend le recyclage du corps de la trottinette, considéré comme un DEEE (déchets d’équipements électriques et électroniques) et géré, à ce titre, par Ecologic. « Avec un taux de recyclage de 8 %, la France fait plutôt mieux que ses voisins européens pour le recyclage de batteries de VAE, se félicite Olivier Moucheboeuf, responsable du pôle technique Norme et réglementation à l’Union Sport & Cycle. Ce chiffre peut sembler bas, mais les batteries intègrent parfois la filière très longtemps après leur mise sur le marché. Nombreuses sont celles qui dorment au fond d’un garage ou qui suffisent encore à l’utilisateur bien qu’elles aient beaucoup perdu en performances. Et puis il y a aussi les batteries envoyées en reconditionnement. » La filière recyclage des trottinettes devrait quant à elle livrer ses premiers chiffres d’ici un an.

Bien recycler sa batterie

Voici quelques conseils pour bien utiliser et bien recycler la batterie de votre vélo ou trottinette électrique.

  • Rechargez votre batterie avec son chargeur d’origine.
  • Ne laissez pas votre batterie branchée quand elle est pleine.
  • Quand vient le moment de la changer, adressez-vous au fabricant de votre vélo ou de votre trottinette via votre revendeur. Laissez-lui votre batterie usagée. La plupart des vendeurs de vélos électriques sont désormais des points de collecte Corepile (Decathlon, Cyclable, Culture Vélo, Altermove, Go Sport, Veloland… au total, Corepile dispose de 1 000 points de collecte). Quant aux trottinettes, la filière est encore jeune mais les vendeurs ont tout intérêt à devenir des points de collecte Screlec et Ecologic.  
  • Ne démontez pas vous-même votre batterie de trottinette électrique.
  • Si votre revendeur refuse de prendre en charge votre batterie usagée, apportez-la, en dernier recours, dans une déchetterie. Même si les déchetteries ne sont pas encore organisées pour les stocker dans les règles de l’art (elles exigent des fûts métalliques homologués), elle sera toujours mieux que dans une poubelle.

Que deviennent les batteries ?

Les éco-organismes Screlec et Corepile sous-traitent le tri, le traitement et la valorisation des batteries à des centres spécialisés comme Euro Dieuze (Veolia) en Lorraine, ou encore SNAM, à Saint-Quentin-Fallavier en Isère. Les batteries usagées sont d’abord totalement déchargées et leur BMS (« Battery Management System », la carte électronique qui gère leur fonctionnement) mis en court-circuit. Ceci évite les départs de feu des cellules, qui sont pour leur part broyées puis plongées dans des solutions qui permettent d’extraire les métaux (nickel, manganèse, cobalt, etc.). Quant au plastique de la coque, il est déchiqueté, refondu puis réutilisé. Dans une batterie au lithium, finalement, seul le lithium n’est pas recyclé. « Il faudrait mettre en place des process bien trop lourds et non rentables, explique David Turmel, directeur des opérations et du développement de Corepile. Mais ce métal ne représente que 0,5 % du total des batteries. » Au final, selon la filière, 60 à 70 % des éléments d’une batterie trouvent une nouvelle vie, dans de nouvelles batteries ou d’autres objets (articles ménagers, gouttières pluviales ou même… turbines de réacteurs).

Camille Gruhier

Camille Gruhier

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