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Sérum végétal d’Yves Rocher

Des salades de jouvence

Difficile d’échapper à la publicité pour la nouvelle gamme de crèmes antirides d’Yves Rocher, sérum végétal. Mais pour les preuves de son efficacité, il faut croire le fabricant sur parole.

Vous n’avez pas pu la rater. La campagne de pub pour la dernière gamme d’antirides d’Yves Rocher, diffusée fin janvier, avait tout du pilonnage systématique : double page dans Le Monde façon imitation d’article ; publicité, non déguisée cette fois, dans Le Parisien, Libération, Le Figaro et tous les grands quotidiens régionaux ; spots télévisés ; offensive de grande ampleur sur Facebook avec des messages parfois pluriquotidiens… Ambition de la marque : toucher 8 femmes sur 10 en moins de 24 heures. Quels produits révolutionnaires pouvaient bien mériter ce traitement exceptionnel ? Le mystère demeurait entier car, même si le nom de la gamme (« sérum végétal ») était bien entendu précisé, aucun résultat chiffré sur les performances des produits n’était donné. Nous avons donc demandé à Yves Rocher de nous transmettre les études étayant l’efficacité de ses dernières crèmes antirides, mais la marque a refusé, préférant nous proposer un rendez-vous. Du coup, les données que nous avons pu recueillir sont moins précises que si nous avions eu le loisir d’étudier de près un dossier scientifique.

Une plante prétendument miraculeuse

Quelles sont les innovations dont se prévaut Yves Rocher pour promouvoir sa crème ? D’abord, le principe actif commun aux produits de sa gamme « sérum végétal ». Il s’agit de la ficoïde glaciale, une plante qui aurait d’extraordinaires capacités d’adaptation, notamment aux différentes conditions climatiques. Les grossistes de Rungis la présentent comme une salade au goût frais, légèrement salé et iodé, qui peut aussi être consommée cuite comme les épinards. Inconscients ! Ils sont passés à côté de son « Génie » (notez la majuscule) que les spécialistes d’Yves Rocher « ont su décrypter ». Convaincus, à tort ou à raison, de la supériorité de cette plante, ils ont décidé de la cultiver sur leurs propres terrains à La Gacilly (Morbihan), afin de conserver l’intégralité des actifs. Du nouveau procédé d’extraction, ils sont également très fiers. Il s’agit de porter la plante à – 70 °C et de se passer de tout solvant. Les molécules ainsi extraites seraient beaucoup plus petites qu’avec un procédé normal d’où une meilleure pénétration. D’ailleurs, nos interlocuteurs nous présentent des résultats d’analyses montrant que cette cryoextraction assure une pénétration de l’extrait dans l’épiderme et une métabolisation que ne permet pas une extraction traditionnelle. Ce faisant, ils taclent involontairement non seulement les produits concurrents mais également tous les autres produits « maison » qui ne sont pas obtenus par ce nouveau procédé.

Pas de résultats extraordinaires

Mais tout cela, ce sont des études en laboratoire et non en conditions réelles, pratiquées avec l’extrait de ficoïde et non avec les crèmes elles-mêmes, qui contiennent par ailleurs pléthore d’autres composants pouvant interagir. D’autre part, pénétration et action antirides ne sont pas synonymes. Sur cette dernière, nous obtenons un chiffre : 11,6 % de densité de rides en moins au bout de 28 jours avec une des crèmes. Honnête mais pas miraculeux. La question demeure : qu’aurait donné une simple crème hydratante ou un produit d’une autre marque ? À ce sujet, nos interlocuteurs assurent qu’ils n’ont mis ces nouvelles crèmes sur le marché que parce que, comparées à l’aveugle à leurs concurrentes principales, elles sont arrivées premières. Mais les jugements des utilisatrices sont forcément subjectifs. Et, sur cette assertion comme pour le reste, on est obligé de croire sur parole les responsables d’Yves Rocher… en attendant de tester ces nouveaux produits lors de notre prochain essai comparatif de crèmes antirides. Jusqu’à maintenant, tous les tests que nous avons menés ont conclu à l’efficacité très modeste voire, dans certains cas, absolument nulle des antirides.

Débauche de publicités pour ses dernières crèmes antirides, mais Yves Rocher a rechigné à nous en transmettre les études.

Gaëlle Landry

Gaëlle Landry

Rédactrice technique

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