Alain Bazot
Président de l'UFC-Que Choisir
L’Autorité de régulation du secteur des communications électroniques (Arcep) vient d’annoncer, via un communiqué de presse, que les enchères entre opérateurs pour obtenir les fréquences 5G auront lieu à la fin du mois de septembre, soit avec 5 mois de retard par rapport au calendrier initial compte tenu de la crise sanitaire.
Ce report, qui entraînera vraisemblablement un retard dans la commercialisation des offres 5G, est loin d’avoir provoqué un torrent de larmes chez les consommateurs qui comprennent bien que la 5G n’a pas vocation à court terme à pallier les problèmes actuels de qualité des réseaux mobiles. Si à terme, le développement de nouveaux services gourmands en bande passante pourra justifier le recours à la 5G pour les consommateurs, la réalité c’est qu’il s’agit d’une technologie ayant, en l’état, prioritairement vocation à être utilisée par les industriels (pour les objets connectés particulièrement).
Mais il n’en demeure pas moins vrai que les opérateurs commercialiseront des forfaits 5G grand public au cours des prochains mois et qu’ils n’hésiteront pas à sortir l’artillerie lourde en termes de campagnes publicitaires pour tenter de convaincre les consommateurs de souscrire de chers abonnements. Il conviendra donc de s’assurer que les opérateurs ne survendront pas les mérites de la 5G.
C’est à l’aune de cette exigence que j’ai pris connaissance dans le communiqué de l’Arcep du fait qu’elle sera « vigilante sur la façon dont les offres 5G seront promues par les opérateurs » et qu’elle souhaite « accompagner » les associations de consommateurs sur les problématiques liées à la lecture des offres commerciales des opérateurs. Comment ne pas relever ce qui s’apparente à une belle hypocrisie ?
En effet, dois-je rappeler que dès la rentrée 2019 l’UFC-Que Choisir avait alerté l’Arcep sur le fait que les spécificités techniques de la 5G risquaient d’entraîner des mystifications marketing par les opérateurs et qu’elle devait en conséquence prévoir dans les autorisations d’exploitation des fréquences 5G toutes les mesures permettant de contraindre les opérateurs à la vertu dans leurs communications ? Dois-je indiquer ici que l’Arcep n’a strictement tenu aucun compte de notre alerte dans l’élaboration définitive de sa décision d’attribution de ces fréquences ?
En résumé, c’est donc un régulateur qui s’est volontairement privé de bâton qui aujourd’hui souhaite guider les associations de consommateurs – qui lui avaient expressément demandé de s’en doter – sur les risques liés à la commercialisation de la 5G. C’est ici confondre le chien et l’aveugle.
Soucieuse, par nature et par fonction, de préserver les intérêts des consommateurs et de convaincre les décideurs d’embrasser ses préconisations, l’UFC-Que Choisir participera bien entendu aux ateliers de l’Arcep, tout en regrettant que les opérateurs aient désormais les coudées bien trop franches pour faire passer des vessies pour des lanternes.
Alain Bazot
Président de l'UFC-Que Choisir
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