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Bonus réparationLe dispositif en passe d’être dévoyé

Élisa Oudin

par Élisa Oudin

Après des années de lobbying, le groupe Fnac Darty semble avoir réussi à convaincre l’un des principaux éco-organismes du secteur de lui ouvrir les portes du bonus réparation. Cette aide financière a pour objectif d’inciter les consommateurs à faire réparer leurs appareils domestiques, en réduisant le coût de cette opération. Explications.

Dès le mois de janvier 2026, les abonnements de réparation, dont le principal est proposé par le groupe Fnac Darty, pourraient devenir éligibles du bonus réparation. Et capter ainsi une bonne partie de la vingtaine de millions d’euros de primes annuelles dédiées à ce dispositif et issues des contributions payées par les consommateurs lors de l’achat d’un produit neuf. Le mécanisme, prévu par la loi antigaspillage pour une économie circulaire (Agec) de 2020, cherche à favoriser la durabilité des appareils électroménagers et informatiques en incitant les consommateurs à les faire réparer plutôt qu’à les remplacer. Une prime (entre 15 et 60 € selon le type d’appareil) est accordée aux réparateurs labellisés QualiRépar pour chaque réparation. Ce montant doit ensuite être déduit de la facture du client.

L’extension du bonus réparation aux abonnements de type Darty Max est proposée par l’éco-organisme Ecosystem dans son dernier plan d’action de décembre 2025. Ce dernier suggère « l’ouverture à l’éligibilité des abonnements de réparation à partir de janvier 2026 (demande de l’ancien ministre de la Transition écologique Christophe Béchu) ». Ecosystem est l’un des principaux éco-organismes chargés de la redistribution des bonus réparation, sur présentation des factures. Il se fonde sur une lettre adressée le 26 juin 2024 par Christophe Béchu, au dernier jour de son mandant, à Nathalie Yserd, la directrice générale d’Ecosystem. Le courrier demande à cette dernière de « finaliser dans les meilleurs délais les travaux permettant d’intégrer les formules d’abonnement au dispositif du bonus réparation ». Un an et demi… et trois ministres plus tard, nous avons souhaité savoir si le ministère de la Transition écologique, actuellement dirigé par Monique Barbut, entend toujours étendre le bonus réparation aux abonnements. Nous sommes dans l’attente d’une réponse.

Changement de pied

Depuis le lancement du bonus réparation en 2022, Fnac Darty n’a eu de cesse de réclamer l’application du mécanisme à son abonnement maison, Darty Max. Cela représenterait une véritable aubaine pour le groupe. L’abonnement Darty Max constitue d’ores et déjà un jackpot, avec une rentabilité financière autour de 30 %. Le service, qui est ni plus ni moins qu’une assurance affinitaire, est facturé entre 143 et 263 € par an. Or, les premières années sont quasi payées à perte par les consommateurs. Les pannes sont rares les 3 ou 4 premières années. En outre, les achats sont couverts par la garantie légale de conformité de 2 ans qui, elle, est gratuite. Enfin, les témoignages continuent d’affluer sur les conditions très restrictives en pratique de la garantie Darty Max, au moment où celle-ci deviendrait enfin utile. Sans compter que l’on voit difficilement l’effet « incitatif » des primes pour un consommateur qui payera son abonnement pendant des mois ou des années avant une éventuelle réparation. Autre sujet majeur : que deviendront les bonus réparation versés à l’entreprise ? Rien ne garantit qu’ils reviendront aux consommateurs, contrairement à l’esprit du bonus réparation qui revient à une réduction de facture. Autant de raisons qui ont jusqu’ici dissuadé d’inclure les assurances « antipanne » dans le dispositif du bonus réparation.

Ce n’est apparemment plus la position de la directrice d’Ecosystem. On notera, par ailleurs, que l’organisme s’est associé à Fnac Darty pour lancer très prochainement un « passeport digital » des appareils recensant les opérations d’entretien et de réparation effectuées. Le groupe de distribution anticipe ainsi l’entrée en vigueur d’une disposition européenne qui sera obligatoire dans 2 ans. Une vidéo, que nous avons pu consulter, permet de voir Enrique Martinez, le directeur général du groupe Fnac Darty, vanter les mérites du dispositif qui va « donner de la valeur aux appareils d’occasion », juste avant que Nathalie Yserd explique combien elle se réjouit de cette démarche.

Élisa Oudin

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