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Rénovation énergétiqueLes délais d’instruction MaPrimeRénov’ continuent de grimper

FP

par Fabrice Pouliquen

Principale aide publique à la rénovation énergétique, MaPrimeRénov’ a connu une année difficile en 2024, entre un retard à l’allumage et les multiples revirements de l’exécutif sur les contours du dispositif. La situation ne s’est guère améliorée depuis, selon des professionnels du bâtiment. Comment l’expliquer ?

C’est une première. Lundi après-midi, des professionnels du bâtiment, des artisans, des mandataires et des particuliers exaspérés ont manifesté devant le siège, à Paris, de l’Agence nationale de l’habitat (Anah) pour dénoncer les dysfonctionnements de MaPrimeRénov’, principale subvention publique à la rénovation énergétique des logements que cette agence pilote.

En février 2024, Que Choisir avait déjà tiré le signal d’alarme sur ce parcours du combattant dans lequel les particuliers s’engagent bien souvent en déposant une demande d’aide MaPrimeRénov’. Rien n’a changé depuis, affirment certains professionnels du bâtiment qui dénoncent des retards de paiement, des retraits arbitraires, des dossiers bloqués depuis des mois et le manque aussi de transparence de l’Anah dans leur instruction. Ithaque, qui accompagne les ménages dans leurs projets de rénovation, déplore des dossiers dont le traitement complet (du dépôt au paiement) peut atteindre 300 jours et évalue à 45 000 les dossiers actuellement en attente.

L’Anah répond

Dans un communiqué diffusé lundi, l’Anah conteste ces affirmations et assure que le délai moyen à l’engagement des dossiers avant travaux est de 63 jours pour les rénovations par geste et 105 pour les rénovations d’ampleur. Le délai moyen de paiement des dossiers après les travaux est, lui, de 49 jours dans le cas des rénovations par geste et de 35 jours pour celles d’ampleur. L’agence reconnaît tout de même que les délais d’instruction sont plus longs depuis le début de l’année. Elle l’explique par l’adoption tardive du projet de loi de finances 2025 (courant février seulement) qui a généré un stock de dossiers en attente, mais aussi par une forte dynamique des dépôts ces derniers mois et, enfin, par un renforcement des contrôles pour lutter contre les tentatives de fraude.

Danyel Dubreuil, coordinateur du pôle Efficacité énergétique du réseau Cler, association qui œuvre à l’accélération de la transition énergétique, comprend en partie cet allongement des délais. « C’est la contrepartie de cet accent mis – et c’est tant mieux – sur les rénovations d’ampleur », explique-t-il. Elles permettent d’aller plus loin dans les gains d’efficacité énergétique et sont ainsi plus profitables pour les particuliers qui réalisent les travaux comme pour l’État qui les subventionne. « Mais ces rénovations font aussi que les dossiers sont plus complexes – on n’est pas sur de simples changements de fenêtres – et engagent des montants d’aides publiques plus importants, reprend le coordinateur du Cler. Forcément, les dossiers sont plus longs à instruire, demandent plus de vérifications, l’Anah étant comptable de l’utilisation des subventions publiques qu’elle octroie. » D’autant qu’en parallèle, la fraude ne faiblit pas dans ce domaine mais reste, au contraire, à l’affût de la moindre faille dans laquelle s’engouffrer. Selon l’Anah, 1 dossier sur 10 qu’elle reçoit serait frauduleux et l’an dernier, ses efforts pour les traquer « ont permis d’éviter 229 millions d’euros de fraude », communiquait-elle récemment.

La lutte antifraude n’excuse pas tout

Mais la lutte contre la fraude n’excuse pas tout. L’instruction des demandes d’aides MaPrimeRénov’ reste grandement améliorable. « L’État pourrait déjà accorder plus de moyens à l’Anah pour les mener, commence Danyel Dubreuil. Par ailleurs, l’Anah peut encore améliorer l’organisation de ses relais dans les territoires, des espaces conseils France Rénov aux MAR (Mon Accompagnateur Rénov’). Ils jouent un rôle clé pour améliorer les dossiers déposés à l’Anah en aidant les demandeurs à transmettre dès le départ les bonnes pièces justificatives, au bon format, etc. »

Tout n’est pas noir pour autant. Au premier trimestre, l’Anah dit avoir aidé 63 509 ménages dans la rénovation de leur logement. Dans le lot, 17 178 faisaient l’objet d’une rénovation d’ampleur, « soit 3 fois plus qu’à la même période l’an dernier ». Rappelons tout de même qu'en 2024, l'instruction des dossiers avait été considérablement ralentie dans les premiers mois de l'année. Plus facile, dès lors, de faire 3 fois plus. 

FP

Fabrice Pouliquen

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