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Catastrophe naturelle

Vers une meilleure prise en compte des sinistres 

Alors que les phénomènes climatiques de grande ampleur ne cessent de se multiplier, le régime de l’indemnisation des catastrophes naturelles va être retouché. Un texte de loi a récemment été adopté dans ce sens. Décryptage.

Presque 40 ans après avoir été mise en place par les pouvoirs publics, la loi qui régit la couverture des risques naturels (inondations et coulées de boue, submersion marine, avalanches, mouvements de terrain, cyclones, ouragans, sécheresse…) et l’indemnisation des victimes vient d’être remaniée le 16 décembre dernier, au terme d’un long parcours parlementaire. Ce texte comporte différentes mesures qui vont impacter directement ou indirectement les particuliers victimes de ces phénomènes climatiques. En voici les principales, sachant que celles-ci n’entreront toutefois en vigueur au plus tôt que le 1er janvier 2023 (à l’exception de la garantie frais de relogement d’urgence qui devrait être applicable auparavant, à une date qui sera fixée par décret), le temps, entre autres, que les assureurs adaptent leurs contrats.

Autre détail qui a son importance : cette loi ne modifie en rien le financement de ce régime des catastrophes naturelles. Autrement dit, pour le moment, aucune augmentation des ressources financières à la disposition des assureurs (via une surprime de 12 % obligatoirement payée par chaque titulaire d’une multirisque habitation) n’a été prévue.

Délai de publication de l’arrêté plus court

Les pouvoirs publics disposent aujourd’hui de 3 mois pour publier un arrêté de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle. Ce délai sera ramené à 2 mois, ce qui, de fait, sera profitable aux assurés touchés par un phénomène climatique exceptionnel.

Délai de déclaration de sinistre plus long

Une fois l’arrêté de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle publié, les particuliers disposent aujourd’hui de 10 jours ouvrés pour envoyer leur demande d’indemnisation à leur assureur. Ils pourront bénéficier d’un délai de 1 mois.

Délai d’indemnisation plus court

Aujourd’hui, l’assureur doit indemniser les sinistrés dans un délai de 3 mois à compter de la date à laquelle il reçoit une demande d’indemnisation et plus précisément, l’état estimatif des dommages et pertes subis établi par l’assuré en l’absence d’expertise ou de la date à laquelle il reçoit le rapport d’expertise définitif, soit si elle est plus tardive, à compter de la date de publication de l’arrêté interministériel qui atteste, pour une zone géographique donnée, d’un état de catastrophe naturelle. Ce délai d’indemnisation va être ramené à 21 jours. Il pourra être de 1 mois si l’assuré donne son accord pour que les réparations soient directement effectuées.

Garantie frais de relogement d’urgence obligatoire

Aujourd’hui, lorsque l’habitation principale est inhabitable, que ce soit pour des problèmes de salubrité, d’hygiène ou de sécurité, les frais de relogement temporaire ne font pas forcément partie des garanties de chaque contrat (à ne pas confondre avec les frais de relogement d’urgence souvent prévus dans les contrats en cas d’incendie ou de tempête par exemple). Demain, ce sera obligatoire, tout comme les frais d’architecte et de maîtrise d’ouvrage associés à la remise en état des habitations. Les modalités de prise en charge de ces différents frais doivent être précisées par décret.

Fin des franchises modulées dans les communes n’ayant pas adopté de plan de prévention des risques naturels prévisibles (PPRN)

L’indemnisation des dommages subis par l’habitation (et autres biens à usage non professionnel) ou par le véhicule (à usage non professionnel) est actuellement grevée d’une franchise légale de 380 €. Depuis 2003, les habitants des communes sans PPRN subissent des franchises plus importantes si leur collectivité territoriale a déjà fait l’objet d’au moins 2 reconnaissances de l’état de catastrophe naturelle (hors sécheresse) : 760 € à partir de la 3e reconnaissance, 1 140 € à la 4e et 3 040 € pour la 5e reconnaissance… Ce dispositif « injuste » selon Marguerite Deprez-Audebert, députée du Pas-de-Calais et rapporteure de la proposition de loi visant à réformer le régime d'indemnisation des catastrophes naturelles, va être supprimé car « le citoyen n’est en effet pas responsable du fait que sa commune ait ou non adopté un tel plan ».

Meilleure prise en compte du phénomène de retrait-gonflement des argiles (RGA)

Ce phénomène de grande ampleur n’est aujourd’hui couvert ni par le régime de catastrophe naturelle, ni par la garantie décennale des constructions ou encore les contrats des assureurs. La loi prévoit, dans les 6 mois, soit d’ici l’été 2022, la remise d’un rapport gouvernemental qui devra examiner « les modalités de financement et d’attribution d’aides de l’État permettant d’indemniser l’ensemble des propriétaires concernés » et proposer des pistes « visant à créer un régime juridique et financier […] soutenable sur le long terme ». Les dispositions qui résulteront de ce rapport pourront déboucher sur un nouveau texte de loi (l’Assemblée nationale a d’ores et déjà adopté, dans le cadre de l’examen du projet de loi 3DS, une habilitation à légiférer par voie d’ordonnance).

Le texte prévoit également un allongement du délai dont disposent les communes, dans le cas de RGA, pour transmettre leur demande de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle. Celui-ci va ainsi passer de 18 à 24 mois. Dans le même esprit, le délai de prescription des assurés pour une action en indemnisation des dommages causés par des mouvements de terrain consécutifs à une sécheresse-réhydratation des sols va passer de 2 à 5 ans.

Nomination d’un référent départemental

Parce que les maires dont les communes sont sinistrées sont souvent (pour ne pas dire toujours…) démunis face aux démarches à effectuer pour une reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle et la mobilisation des dispositifs d’aide et d’indemnisation susceptibles d’être engagés, un référent à la gestion des conséquences des catastrophes naturelles et à leur indemnisation va être nommé auprès du préfet, dans chaque département. Dans un souci de transparence qui n’existe pas aujourd’hui, son rôle sera étendu à la « communication aux communes, à leur demande, des rapports d’expertise ayant fondé les décisions de reconnaissance de l’état de catastrophe naturelle ».

Création d’une commission nationale consultative des catastrophes naturelles

Cette instance sera composée de représentants d’élus et d’associations de victimes. Elle sera chargée d’analyser chaque année la pertinence des critères retenus pour prononcer (ou non) l’état de catastrophe naturelle. « Jusqu’à présent, ceux-ci ne sont pas communiqués aux citoyens. Demain, ils vont l’être, ce qui est un vrai progrès », souligne Christine Lavarde, sénatrice des Hauts-de-Seine et rapporteure également de la proposition de loi.

Roselyne Poznanski

Roselyne Poznanski

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