Fabienne Maleysson
Leurs composés passent dans le sang
La barrière cutanée ne suffit pas à empêcher les composés des cosmétiques de pénétrer dans notre organisme. Une nouvelle étude portant sur les perturbateurs endocriniens le démontre.
Parabens, triclosan, benzophenone, phtalates… les perturbateurs endocriniens susceptibles de se retrouver dans les produits cosmétiques ne sont pas rares. Pas grave, si l’on en croit un mythe longtemps entretenu par les industriels : les cosmétiques resteraient à la surface de la peau, ils ne franchiraient pas la barrière cutanée. Dès lors, aucun risque que d’éventuels composés indésirables présents dans nos crèmes de jour ou nos déodorants menacent notre santé.
Une étude menée par des chercheurs du Centre pour la recherche environnementale et la santé des enfants, à l’Université de Berkeley en Californie, vient encore une fois de montrer qu’il n’en est rien. Elle a porté sur cent jeunes filles âgées de 14 à 18 ans. Plus des deux tiers utilisaient chaque jour crème hydratante et produits de maquillage, et au moins un jour sur deux du parfum. L’usage de crème solaire était également répandu. Les jeunes filles se sont vu remettre des cosmétiques sans parabens, triclosan et benzophénone, des ingrédients à risque. Les produits étaient également censés ne pas contenir de phtalates, composés qui peuvent être utilisés pour la fabrication de parfums introduits dans les cosmétiques. Les chercheurs avaient donc fourni des références étiquetées soit « sans parfum », soit « sans phtalates ».
Des échantillons d’urine des jeunes filles ont été recueillis au début de l’étude, puis après trois jours de ce changement d’habitudes. Le phtalate le plus présent en début d’étude a vu sa concentration baisser de 27 % ; le triclosan de 36 % en général et de 70 % chez les jeunes filles ayant déclaré être utilisatrices de dentifrice au triclosan (le plus répandu étant Colgate total) ; la benzophenone-3 de 36 % en général et de 52 % chez les adolescentes utilisatrices de crème solaire. Si les résultats sur les parabens sont plus inconstants, le doute n’est plus permis : l’utilisation de cosmétiques contenant des composés indésirables laisse bien des traces dans l’organisme. C’est encore plus fâcheux lorsqu’il s’agit de perturbateurs endocriniens et que les utilisatrices sont des adolescentes, population à risque vis-à-vis de ces composés qui interfèrent avec notre système hormonal.
Déjà fin 2015, des chercheurs avaient montré qu’un ingrédient utilisé dans les vernis à ongles et soupçonné d’être perturbateur endocrinien, le triphenyl phosphate (TPHP), passait dans le sang. Après s’être fait les ongles avec des vernis en contenant, les participantes de l’étude avaient les urines sept fois plus chargées en diphenyl phosphate, le produit de dégradation du TPHP.
La bonne nouvelle de l’étude californienne, c’est qu’en choisissant des produits moins problématiques, on constate rapidement des effets positifs.