Fabienne Maleysson
Peu d’entre eux donnent le sourire
Entre une efficacité pas toujours au top et la présence de diverses familles de substances indésirables, le bilan global de ce test n’est pas très réjouissant.
→ Test Que Choisir : Comparatif Dentifrices
Décevant. C’est le qualificatif qui s’impose au vu des résultats globaux de ce comparatif. Si plusieurs références s’en tirent honorablement, l’ensemble demeure assez médiocre et aucune ne mérite . En entrant dans les détails, on est surpris que de grandes marques ne parviennent pas à exceller sur des critères primordiaux alors que nous avons évalué des dentifrices standards, sans revendication particulière, ceux qui a priori ne sont pas très compliqués à formuler.
Premier constat étonnant : un seul produit, Fluocaril bi-fluoré, affiche une teneur idéale en fluorures disponibles (ceux susceptibles d’exercer un effet). Plus de la moitié des références testées héritent d’une note moyenne, c’est moins bien que lors de nos précédents essais. Fâcheux quand, selon tous les spécialistes de la question, au premier rang desquels l’Organisation mondiale de la santé, une quantité de fluor suffisante est la condition sine qua non de l’efficacité anticarie. Autre observation, une dizaine de dentifrices s’avèrent trop abrasifs. Au lieu de protéger l’émail, ils risquent de l’endommager. Pour ceux ayant écopé de , nos analyses montrent que l’abrasivité peut être considérée comme dangereuse si l’on se réfère aux valeurs définies par les autorités de santé américaines. Enfin, l’efficacité de nettoyage, c’est-à-dire la capacité à éliminer un mélange salissant (thé, café et autres colorants), est trop rarement au rendez-vous, alors que, là encore, c’est le minimum qu’on puisse demander.
Toujours trop de substances problématiques
Autre reproche auquel seuls quatre dentifrices échappent : la présence de substances indésirables. Trois sortes d’ingrédients sont encore trop fréquemment utilisés alors que leur absence dans certains produits – parfois au sein d’une même marque – prouve que l’on peut s’en passer sans dommages. D’abord, le sodium lauryl sulfate (« Irritant potentiel » dans nos résultats), utilisé notamment comme agent moussant, a été repéré dans plus d’un tiers des produits. Or, il possède un fort potentiel irritant auquel certains utilisateurs ne sont pas sensibles, mais qui, chez d’autres, provoque des aphtes. Heureusement, au fil du temps, il se fait plus rare. Autre groupe de composés trop souvent présents : les allergènes, issus notamment des ingrédients permettant de conférer un goût unique au dentifrice. Rappelons que les allergies concernent un nombre croissant de personnes et que l’on peut être touché à tout âge, même après des décennies d’usage sans réactions notables.
Les colorants, quant à eux, ne servent qu’à séduire le consommateur en améliorant l’apparence de la pâte. Le choix de plusieurs fabricants d’intégrer des molécules interdites dans l’alimentation a de quoi surprendre car, même s’il s’agit de doses infimes, on ingère toujours un peu de dentifrice lors du brossage. Deux marques, Aquafresh et Dentalux (Lidl), incorporent même du dioxyde de titane (TiO2) alors que les alertes des scientifiques sur cet agent blanchissant ont conduit la France, puis l’Union européenne à le proscrire dans les denrées alimentaires.
Fréquemment présent sous forme nanométrique, synonyme de potentiels effets toxiques spécifiques, cet additif agirait, selon certaines études, comme un promoteur de cancers. L’UFC-Que Choisir plaide pour que son bannissement soit étendu aux cosmétiques et aux médicaments, Hélas sans succès jusqu’à présent. Concernant les dentifrices, la pertinence de cette demande a été renforcée par la publication, en janvier 2023, de résultats de recherches montrant que le TiO2 passait directement dans le sang depuis les muqueuses de la bouche. Autrement dit, le risque existe même sans ingestion.
Heureusement, sans attendre une éventuelle mesure réglementaire, des entreprises ont décidé d’exclure le dioxyde de titane. L’été dernier, l’Association de veille et d’information civique sur les enjeux des nanosciences et nanotechnologies (Avicenn), spécialiste des questions liées aux « nanos », s’était réjouie qu’il ait disparu d’une cinquantaine de dentifrices en deux ans. Étonnamment, on le retrouve encore dans quelques-uns labellisés bios : nos homologues suisses du magazine Ma Santé en ont mesuré dans ceux des marques Logodent, Sante Naturkosmetik et Dr. Hauschka. Interrogée, cette dernière explique qu’elle a procédé à des reformulations afin d’éliminer le dioxyde de titane, mais qu’il reste autorisé par l’organisme de certification Natrue puisque c’est un composé naturel. Un argument qui laisse pantois… De son côté, Cosmébio, autre certificateur, l’a proscrit en tant que colorant, et les produits labellisés doivent le supprimer d’ici à la fin de l’année.
Un impact environnemental élevé
Enfin, l’environnement n’est pas toujours suffisamment pris en compte : quantité importante de pâte demeurant dans le tube en fin d’utilisation (13 % pour Oral-B !), présence de suremballage (étui en carton, en plus du tube), non-recours à du plastique recyclé, ingrédients trop polluants, notamment toxiques pour les organismes aquatiques. Sur ce point, le dentifrice Lavera reçoit une des pires notes. Il cumule en effet des extraits de sauge, d’eucalyptus et du limonène, dont l’odeur flatte nos narines mais que la faune marine et d’eau douce ne peut ingérer sans danger. Cette piètre performance est d’autant plus regrettable qu’il s’agit du seul à obtenir de bons scores aux trois critères d’efficacité et de sécurité (fluor, abrasivité et nettoyage). S’il a décroché la première place du classement lors de notre précédent comparatif, l’appréciation de l’impact environnemental des produits testés le pénalise désormais. Un enjeu que ne devraient pas ignorer les marques bios.
Chlorhexidine
De grandes marques l’utilisent
Si nous sommes avant tout exposés à la chlorhexidine via les désinfectants, cette substance faisant l’objet d’une alerte des autorités de santé entre aussi dans la composition de certains dentifrices. Elle est reconnue pour son efficacité à éliminer la plaque dentaire, mais un usage prolongé pourrait engendrer des résistances microbiennes et une coloration des dents. Aucune des références testées ici n’en contient, mais nous l’avons repérée chez Gum (Paroex et Gingidex), Elgydium (Blancheur, Dents sensibles, Protection gencives, Antiplaque), Parogencyl (Soin intensif gencives), Fluroyl, Curasept ou encore Sanogyl (Soin rose, Soin bi-protect). Si vous présentez un terrain allergique, il est conseillé de vous abstenir d’utiliser ces produits.
→ Test Que Choisir : Comparatif Dentifrices
Gaëlle Landry
Rédactrice technique