CONSEILS
Jardin écoresponsable

La haie à l’honneur

Faire joli et protéger des regards importuns ne suffisent plus. Désormais, la haie a bien d’autres vertus et son écosystème profite à tout le jardin. Mais il faut la chérir. Nos conseils pour obtenir une haie harmonieuse, variée et vigoureuse.

La haie constitue bien plus qu’un simple écran. Elle doit remplir plusieurs rôles pour faire d’un jardin un espace résilient. Dans l’idéal, elle sait tout fabriquer, ou presque : des fleurs, des baies, des fruits, des épines pour protéger les nids des oiseaux, des feuilles pour les paillis et même du bois mort qui nourrit les champignons et dynamise la vie au sol. Son action se ressent jusqu’à une certaine distance. Ainsi, une haie coupe le vent sur une longueur égale à trois fois sa hauteur, crée de l’ombre jusqu’à deux fois sa hauteur (en hiver) et favorise une vie active du sol sur trois fois sa largeur. Pour cela, elle doit être composée d’une grande diversité d’essences ; les meilleures incluent des aubépines, des pommiers d’ornement (à fleurs et petits fruits), du lierre, des noisetiers, des arbustes à baies (cotonéasters) et d’autres à fleurs (forsythias, photinias)

Choisir ses arbustes

Pour composer votre haie naturelle – dite aussi champêtre ou libre –, préférez des arbustes adaptés au sol de votre jardin, à l’exposition et au climat de votre région. Cela fera naître des plantes saines et vigoureuses, nécessitant un entretien minime. Ainsi, dans les zones méditerranéennes, pensez à l’arbousier, à l’arbre de Judée et au gattilier ; dans les territoires continentaux ou montagnards, au charme, à l’aubépine, au cornouiller sanguin et au sureau ; sous climat océanique, au tamaris et à l’éléagnus. À la campagne, faites une haie libre en alternant houx, lierre et buis pour leur feuillage persistant ; charme, aubépine, cornouiller sanguin, sureau et noisetier pour leurs feuilles caduques. En ville, arborez une haie champêtre avec buis, houx, mahonia, laurier-tin, pyracantha et troène (persistants), mais aussi rosier botanique, amélanchier, noisetier, buddléia, viorne lantane et kolkwitzia (caducs).

Et pourquoi pas du lilas ? En alternant les variétés.

Vous créerez une haie harmonieuse en intégrant des plantes à feuillage persistant, ce qui conserve volume et structure en hiver, et des arbustes offrant floraisons et fructifications, nourriture appréciée des insectes auxiliaires et des oiseaux. Certains restent décoratifs une bonne partie de l’année, comme l’amélanchier qui allie fleurs blanches, baies et couleurs d’automne, ou encore le rosier botanique qui porte fleurs et fruits. L’association de différentes strates végétales dans la haie fournit également des habitats variés aux insectes utiles, aux oiseaux et aux autres petits animaux qui y trouvent refuge. Selon l’emplacement de la haie, la réglementation locale à respecter et l’espace disponible, il faudra sélectionner des espèces de hauteur appropriée, afin de limiter les interventions de coupe ou de taille.

Une haie écologique n’a pas besoin de faire 2 mètres de hauteur. Les oiseaux et les hérissons se moquent bien des dimensions pourvu qu’ils y trouvent des conditions accueillantes… Laissez les feuilles mortes à ses pieds et accordez-lui la même période de tranquillité qu’à une haute haie traditionnelle. Une clôture basse, d’à peine 80 cm par exemple, est tout à fait envisageable si elle s’avère large d’au moins 50 cm, et on peut y mêler des espèces en fleurs avec des arbustes plus classiques. Après quelques tailles, tout le monde aura trouvé son rythme. 

Économiques et à croissance rapide, les plants de petite taille (de 20 à 40 cm de hauteur), âgés de 2 à 3 ans, sont idéals. Vigoureux, ils prennent racine facilement et rattrapent en quelques années la croissance de végétaux plus développés. Ils sont présentés à racines nues ou en godets. Si possible, achetez vos arbustes chez un producteur local afin de privilégier des variétés déjà acclimatées. Sachez que les jeunes plants forestiers sont proposés par des pépiniéristes entre 1,50 et 6 € le sujet. Les périodes les plus favorables à la plantation sont octobre-novembre et février-mars pour les plantes vendues en conteneur, notamment les arbustes à feuillage persistant. Les plants à racines nues peuvent être installés à l’automne, ils s’enracineront ainsi pendant l’hiver sans être arrosés.

 Bon à savoir  Il existe un conseil d’architecture, d’urbanisme et d’environnement (Caue) dans chaque département. Une de ses missions consiste à vous communiquer une liste de végétaux particulièrement adaptés à votre région, notamment pour les haies. Il peut même vous indiquer comment vous les procurer. Certains vont jusqu’à organiser des distributions de plants, souvent en lien avec des associations locales.

Adopter un schéma

Pour créer une nouvelle haie, plantez les arbustes soit sur une ligne, à 1 m de distance environ les uns des autres, soit en quinconce (sur deux lignes décalées), à 1,2 m environ les uns des autres, selon la taille de votre jardin. Pour faire évoluer une haie, deux solutions : soit vous doublez avec des plantes moins hautes et installez alors ces arbustes en décalé par rapport à la haie déjà en place, à 1 ou 1,2 m selon le développement futur de l’arbuste. Soit vous remplacez, chaque année, pendant 4 à 6 ans, une partie de la haie de façon à la renouveler en totalité sans qu’elle cesse de jouer son rôle de protection du jardin. Après avoir arraché certains éléments, enrichissez la terre de rebouchage du trou de plantation en la mélangeant, selon le volume, avec une ou deux pelletées de compost ou de fumier décomposé. S’il est difficile de remplacer une rangée de thuyas par une haie champêtre, on peut en arracher progressivement certains et planter à leur place aubépines, noisetiers ou rosiers rugueux.

Pour obtenir une bordure à fruits, on plantera des arbres fruitiers sur un rang, en les espaçant assez pour qu’ils ne se gênent pas – soit un tous les 5 mètres au moins. Noyers, cerisiers, poiriers et autres essences fruitières de grand développement sont ici convoqués ; il faudra bien les répartir. Entre chacun, on disposera de petits arbustes à baies ou fruitiers, toujours en gardant assez d’espace pour qu’ils puissent tous se développer. Attention, selon les essences choisies, ce type de haie encombre autant qu’un verger et n’offre pas de gain de place. On l’installera à 2 mètres au moins d’une clôture mitoyenne pour éviter les problèmes de voisinage.

 À noter  La plantation d’une haie entre deux parcelles voisines doit être effectuée entre 50 cm (au minimum) et 2 m de la limite de propriété. Elle doit aussi être maintenue à une hauteur inférieure à 2 m (ailleurs dans le jardin, les arbustes peuvent dépasser cette taille). Renseignez-vous en mairie avant de planter ; il peut exister un arrêté municipal plus restrictif que la réglementation officielle.

Ni tourbe ni sable

Il s’agit ici de creuser un simple mais large trou ; on place un plant dedans puis on comble avec du compost mûr lorsque la terre est argileuse. Dans tous les cas, on n’apporte jamais de tourbe ni de sable, il faut uniquement de la matière organique décomposée.

La meilleure période pour créer une haie se situe de novembre à mars. Celles conçues en plein été donnent rarement de bons résultats. À savoir encore : les plants à racines nues reprennent mieux que ceux en motte, et il est utile de mettre à leur pied des végétaux couvre-sol, tels fusains (Euonymus fortunei), Pachysandra, millepertuis, genévriers rampants, etc. Oubliez la toile de paillage en maille synthétique : non seulement elle ne se décompose pas, mais en plus elle contrecarre les bénéfices d’une haie sur la vie du sol.

Bien entretenir

Si vous avez planté en automne et choisi des espèces adaptées au climat régional, arrosez copieusement une fois par semaine durant les deux étés suivant la plantation en période de sécheresse marquée. Pour limiter les arrosages comme les mauvaises herbes et favoriser l’enracinement, étalez sur le sol humide un paillis après la plantation (ou avant s’il s’agit d’un feutre de paillage biodégradable). Utilisez alors compost, broyat et rameaux, feuilles mortes ou paillettes de lin. Une fois la haie établie, renouvelez le paillis tous les 2 ou 3 ans, au printemps.

Quand tailler ?

Mieux vaut attendre 1 an après la plantation des arbustes, en coupant les tiges à 15 ou 20 cm du sol environ pour les plus petits, et de moitié de leur longueur pour les plus grands. Cela les oblige à se ramifier et donc à buissonner. Par la suite, une coupe annuelle suffit pour une haie champêtre. La fin de l’hiver est un bon moment, mais veillez à préserver les nids d’oiseaux. Adoptez une taille douce, respectant la silhouette naturelle des végétaux.

Soignez la taille, en prenant en compte les spécificités de vos arbustes.

Une haie écologique n’a pas besoin d’être très formelle ni très entretenue, même si elle peut être taillée régulièrement. Qu’il soit installé autour d’un beau jardin ou d’un simple terrain, ce type d’alignement n’est pas nécessairement travaillé tous les ans. En effet, certaines essences qui composent une haie vivante, comme l’aubépine ou le sorbier, ne fleurissent que sur le bois des années précédentes. C’est l’une des différences avec les arbustes de haie classique. Si vous taillez la haie bocagère annuellement, ces végétaux ne fleuriront pas. Or, sans fleur, pas de butineurs, et rien à grignoter pour les oiseaux, qui se rabattront… sur les arbres fruitiers ! Une coupe tous les 2 à 3 ans suffit amplement, et vous récupérerez les déchets de taille suffisante pour passer au broyeur. Pensez à intervenir en hiver, avant que les buissons ne soient en feuilles.

En France, la haie bocagère régresse…

C’est vrai, malheureusement. Malgré les encouragements à en recréer, et la lente évolution de la politique agricole européenne, il y a davantage de haies champêtres détruites que replantées. Environ 200 km disparaissent chaque année en France. La cause en revient notamment à la course au gigantisme du matériel agricole : certaines rampes de traitement utilisées en agriculture intensive font 45 m de largeur et, pour manœuvrer les engins qui les portent, une haie est forcément gênante, même située à 20 m de là. Et cela ne va pas s’arranger : la prochaine génération de rampes mesurera… jusqu’à 60 m !

→ Retrouvez tous nos conseils dans le Que Choisir Pratique Jardin écoresponsable

AL

Annie Lagueyrie

JG

Jean-Michel Groult

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