ENQUÊTE
Circuits courts

Où acheter local ?

Paniers sur abonnement, Amap, magasins de producteurs, épiceries solidaires, plateformes numériques… La vente de produits alimentaires en direct, ou via un seul intermédiaire, prend toujours plus d’ampleur, année après année. Et c’est tant mieux. Les circuits courts répondent au désir des consommateurs de renouer avec des fondamentaux perdus depuis longtemps : saisonnalité, proximité et lien social. Et ils offrent une alternative aux producteurs face à la guerre des prix imposée par la grande distribution. Mais derrière ce paradigme séduisant, les garanties sont-elles toujours au rendez-vous ? Qualité rime-t-elle avec proximité ? Les engagements sont-ils respectés ? Des questions auxquelles il n’est pas toujours facile d’apporter une réponse, d’autant que les as du marketing ont flairé le bon filon et brouillent les cartes. De plus, toutes ces initiatives sont souvent prises au niveau local, c’est-à-dire qu’elles émanent d’initiatives individuelles, de microstructures ou d’associations à but non lucratif, dont le degré d’engagement vis-à-vis de la pratique commerciale peut varier. Il existe bien quelques grands réseaux nationaux qui tentent de fédérer tout ce petit monde en ébullition, mais ils laissent dans l’ombre de grandes zones de la carte de France. Difficile dans ces conditions de s’y retrouver et d’identifier les possibilités de consommer local à proximité de son domicile. Voici quelques points de repère pour y parvenir en fonction de votre budget, de vos envies, de vos disponibilités et de votre engagement.

L’achat direct aux producteurs

Les marchés de plein vent

Historiquement, les foires et marchés de plein vent étaient le lieu où les paysans venaient vendre leur récolte. Mais aujourd’hui, sur la plupart de ces marchés de détail, les stands sont majoritairement tenus par des commerçants itinérants qui achètent leurs marchandises dans les réseaux de vente en gros. Toutefois, les producteurs font de la résistance et sont toujours bien présents sur les marchés de nombreuses villes, surtout dans les régions à dominante rurale, en Ardèche, en Corrèze ou dans la Manche, par exemple.

Reste qu’il est difficile pour les consommateurs de s’y retrouver, d’autant que les vrais producteurs pratiquent parfois la revente d’autres produits pour compléter leur offre.

Afin de clarifier la situation, l’Inrae (Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement) a créé un système d’étiquetage, baptisé « Ici.C.Local » (encadré ci-dessous), qui permet de faire la différence avec les produits issus de filières longues (avec plusieurs intermédiaires). Une démarche lancée sur le marché de Grabels, près de Montpellier (34), qui commence à faire tache d’huile…

Notre avis
Les marchés sont toujours des fêtes pour les yeux et des lieux de convivialité. Le bémol, c’est que le pire y côtoie souvent le meilleur. N’hésitez pas à vous renseigner auprès des commerçants et à poser des questions sur l’origine des produits.

Un étiquetage transparent

Le marché de Grabels, au nord de Montpellier, propose principalement des produits issus de circuits courts, vendus en direct par des producteurs ou par des intermédiaires s’approvisionnant surtout auprès de ceux-ci. Tous les exposants ont adopté le système d’étiquetage Ici.C.Local, créé par l’Inrae. Il permet d’identifier clairement, sur les étals ou via des ardoises de couleur, l’origine des produits proposés.

Les étiquettes vertes signalent des produits locaux (issus d’exploitations situées à moins de 150 km) et durables (interdiction de techniques industrielles telles que les serres chauffées, l’élevage en batterie, les OGM dans l’alimentation animale, etc.).

Les étiquettes orange identifient les produits achetés en direct à un autre producteur, dans la région ou dans un département limitrophe, dont on se porte garant.

Les étiquettes violettes désignent des produits achetés en circuit court, mais non locaux.

Les marchés fermiers

Les Marchés des producteurs de pays regroupent exclusivement les producteurs fermiers et artisans de la région. On en compte plus de 500 dans l’Hexagone. Encadrés par les Chambres d’agriculture, les exposants doivent respecter une charte de bonnes pratiques garantissant notamment des produits locaux, de saison, et une transparence sur les modes agricoles. Le logo (ci-dessus) les distingue des marchés de plein vent classiques. Informations et calendrier sur le site www.marches-producteurs.com.

Notre avis
Là, c’est clair, on ne trouve que des producteurs en vente directe. Le bémol, c’est qu’ils sont souvent saisonniers et que l’offre est parfois limitée.

La vente directe à la ferme

On ne compte plus les agriculteurs qui proposent la vente à la ferme. C’est sans doute la forme la plus radicale de circuit court ! Mais elle est consommatrice de temps pour les consommateurs comme pour les producteurs. Outre le bouche-à-oreille, vous pouvez trouver des adresses sur Internet par le biais des nombreux réseaux qui les fédèrent. Le plus important d’entre eux, Bienvenue à la ferme, créé par les Chambres d’agriculture, regroupe aujourd’hui près de 4 600 producteurs, professionnels de la vente directe. Tous les renseignements et adresses sont sur www.bienvenue-a-la-ferme.com et www.fraisetlocal.fr.

Notre avis
Au-delà de l’achat en direct de produits fermiers, la visite d’une exploitation agricole est toujours enrichissante. C’est l’occasion de tisser des liens et de constater de visu la façon dont les fruits et les légumes sont cultivés ou dont les animaux sont élevés. Mais tout le monde n’a pas forcément une ferme à proximité de chez soi, et l’offre de produits peut être limitée.

Les drives et les casiers fermiers

Souvent encouragées par les Chambres d’agriculture ou par leur municipalité, de plus en plus de fermes développent ce service. La démarche est la même que celle de la grande distribution, à ceci près que les drives fermiers ne proposent que des produits locaux et de saison, et exclusivement en circuit court. Les producteurs préparent les commandes passées sur Internet juste avant que les consommateurs viennent les retirer dans un point de retrait, à la date et au créneau horaire convenus. Le service prévoit une aire de stationnement pour le chargement des courses dans le coffre du client. Renseignements et adresses sur www.drive-fermier.fr.

Sur un principe similaire, les casiers fermiers sont des distributeurs automatiques implantés dans des villages ou à proximité d’une exploitation agricole. Les produits sont présentés dans des casiers vitrés et réfrigérés. Les clients peuvent y récupérer leur commande ou faire leur choix parmi les produits proposés, au gré de leurs besoins. De création assez récente, ces casiers, très pratiques pour les producteurs comme pour les consommateurs, étaient déjà plus de 400 en 2018, et ils devraient se multiplier dans les prochaines années.

Notre avis
Adaptés aux contraintes de la vie moderne, ces canaux de distribution sont bien pratiques. Manque toutefois le contact humain, si précieux dans les circuits courts.

Les achats en magasin

Les magasins de producteurs

Depuis quelques années, les magasins de producteurs fleurissent dans les centres-villes ou à la lisière des agglomérations. Modeste épicerie ou enseigne généraliste, le concept est le même : les marchandises restent la propriété des producteurs qui se chargent de gérer les stocks, de fixer les prix de vente et d’intégrer les charges fixes du magasin. Considérés comme le prolongement de leur activité agricole, ces magasins sont autogérés par les adhérents et garantissent à leurs clients une véritable traçabilité. Afin de diversifier leur assortiment, les agriculteurs peuvent compléter leur production par de l’achat-revente à hauteur de 30 % de leur chiffre d’affaires. Il y aurait aujourd’hui plus de 500 magasins de producteurs en France, des petites villes aux grandes métropoles, pouvant regrouper jusqu’à 80 partenaires. Vous les trouverez sur www.magasin-de-producteurs.fr.

Autre piste à ne pas négliger : les points de vente des lycées agricoles. De vrais circuits courts et un encouragement pour nos agriculteurs en herbe !

Notre avis
Ces points de vente constituent une solution très appréciée des consommateurs comme des producteurs, qui trouvent là la possibilité d’établir un dialogue, de parler de leurs produits et de la façon de les préparer. Les services rendus (horaires, étendue de l’offre, disponibilité des producteurs, mode de culture, etc.) varient cependant énormément d’un endroit à l’autre.

Les boutiques paysannes, du « 100 % fermier » certifié

Face à l’exploitation marketing du terroir, le réseau des Boutiques paysannes, en Occitanie, joue la carte de l’authenticité. Dans ces magasins repérables au coquelicot rouge qui leur sert de logo, les clients sont assurés de trouver exclusivement des produits issus des champs et des exploitations adhérentes. La pratique de l’achat-revente est totalement interdite, et les producteurs sont présents pour vendre directement leurs produits. Le respect de cette charte est vérifié tous les ans par le groupe Bureau Veritas Rhône-Alpes. Plus d’informations sur www.boutiquespaysannes.fr.

Les magasins de produits locaux

Sur un modèle économique différent, les magasins de produits locaux exploitent un concept assez similaire. Gérés par des entrepreneurs, ils proposent une offre de produits issus majoritairement ou exclusivement de producteurs et de PME implantées dans une zone géographique donnée. La chaîne de 12 magasins Au bout du champ s’engage ainsi à vendre exclusivement des fruits et des légumes récoltés le jour même, à moins de 150 km. Issue d’un partenariat avec des agriculteurs d’Île-de-France, l’offre est complétée, à ce jour, par quelques produits laitiers, articles d’épicerie et boissons. La marge de 50 % perçue par l’enseigne peut sembler élevée, mais les producteurs fixent eux-mêmes leurs tarifs et le rapport qualité/prix est au rendez-vous. Le taux de marge varie d’un réseau à l’autre, ainsi que le mode de fixation des prix. De même que le mix entre produits locaux et circuits longs. Toutefois, la plupart d’entre eux affichent les noms et la localisation de leurs fournisseurs sur une grande carte de la région. Les magasins de produits locaux ne sont pas l’apanage de la région parisienne. Le concept a essaimé dans de nombreuses villes : Ty Prod (29), Localement bon (12), Goût et qualité (44), Locavorium (34), etc.

Notre avis
Ces magasins, bien que gérés sur un modèle traditionnel, respectent les grands principes de la traçabilité et quand, c’est possible, des circuits courts. Ils permettent à une clientèle urbaine d’avoir accès à des produits maraîchers de grande qualité. N’étant pas contraints par la règle des 30 %, ils peuvent élargir leur offre à des produits complémentaires (épicerie, produits laitiers, etc.). Toutefois, les dérives sont faciles. Au consommateur d’ouvrir l’œil…

Les magasins des coopératives agricoles

Le succès des magasins de producteurs a fait des envieux : les grosses coopératives agricoles se sont lancées dans la bataille. Leurs chaînes de magasins font florès à la périphérie des villes, dans les zones commerciales : Frais d’ici et les jardineries Gamm Vert (In Vivo) ou Mon marché occitan (Arterris), La Table des producteurs (Euralis), etc. Ces moyennes surfaces proposent un large assortiment de produits bruts (fruits et légumes) ou de produits transformés (charcuterie, conserves artisanales, biscuits, etc.) en privilégiant la production de leurs adhérents, ce qui leur permet de revendiquer l’appartenance aux circuits courts.

Notre avis
Les quantités en jeu, les méthodes de production intensive et la taille des exploitations concernées les rapprochent davantage de la grande distribution que des magasins de producteurs.

Les chaînes de magasins bio

Que ce soit par conviction ou au nom d’intérêts bien compris, l’offre de produits locaux ou en circuits courts est devenue incontournable dans les enseignes spécialisées bio. Mais elle se limite le plus souvent aux fruits et légumes, voire aux œufs et aux produits de boulangerie. Dans tous les cas, l’achat en direct auprès d’exploitants agricoles ne représente au plus que 20 % du chiffre d’affaires du magasin. Et si, pour des chaînes comme Biocoop, le local est défini de manière précise dans un rayon de 150 km autour du point de vente, pour les indépendants, il est à géométrie variable.

Notre avis
Si les produits locaux et en circuit court restent minoritaires dans les enseignes spécialisées bio, ces magasins généralistes permettent tout de même de faire son marché dans une démarche durable et responsable. Les produits locaux sont identifiables par un étiquetage spécifique.

Les réseaux solidaires

Les Amap

Les Associations pour le maintien d’une agriculture paysanne (Amap) sont apparues en France en 2001. L’objectif est de garantir l’accès à des produits bio à des prix accessibles, grâce à un système d’échange direct et solidaire entre consommateurs et producteurs.

Les premiers s’engagent à l’avance et par contrat à acheter la production des seconds sur une saison donnée (printemps-été ou automne-hiver). Le prix du panier permet au paysan de couvrir ses frais et de dégager un revenu décent, tout en étant abordable pour le consommateur. Certains adhérents participent bénévolement à la vie de l’Amap (par exemple, gestion des adhésions, participation aux distributions). En contrepartie, les agriculteurs partenaires doivent fonctionner dans le respect des principes d’une agriculture paysanne (ferme à taille humaine, pratiques écologiques, etc.). Connues surtout pour les fruits et légumes, les Amap distribuent également des œufs, des produits laitiers et de la viande. En 2018, on en comptait plus de 2 000 en France, qui rassemblaient 3 700 paysans environ. Explications détaillées et adresses sur www.reseau-amap.org et www.miramap.org.

Notre avis
Cette formule repose sur une implication très forte des producteurs comme du groupe de consommateurs adhérents. Acte militant autant que circuit de distribution, elle procure une sécurité appréciable aux premiers. En revanche, le fait que le contenu du panier soit imposé et pas toujours très varié risque de lasser les adhérents les moins motivés.

Les épiceries collaboratives

Inspiré de la Park Slope Food Coop, un magasin coopératif new-yorkais, une version française, La Louve, a ouvert ses portes en 2017 dans le XVIIIarrondissement de Paris. Pour obtenir le droit d’y faire ses courses, il faut être membre de la coopérative et consacrer quelques heures par mois au fonctionnement du magasin (réception des marchandises, choix des fournisseurs, mise en rayon, nettoyage, etc.).

En contrepartie, les coopérateurs peuvent s’y procurer des produits en majorité biologiques et locaux à petit prix, grâce aux économies réalisées sur les coûts de personnel (même si huit employés sont salariés à temps plein), mais aussi au recours minimal aux intermédiaires. Un modèle qui fait des émules un peu partout en France : Diony Coop à Saint-Denis, La Chouette Coop à Toulouse, La Cagette à Montpellier, L’Éléfàn à Grenoble ou encore SuperQuinquin à Lille.

Moins médiatisés que La Louve, les Épis sont des épiceries participatives créées et gérées par leurs adhérents, dont le fonctionnement est facilité par une plateforme informatique qui sert à la fois de boutique en ligne et d’outil de gestion pour les membres des épiceries. Elles proposent des produits locaux et de qualité à des prix attractifs car sans marge ajoutée. Plus de 80 Épis ont ouvert en France depuis 2016, et autant sont en cours de création. Pour plus d’informations : www.monepi.fr.

Dans le même esprit, mais avec l’objectif de toucher un public précaire, des épiceries solidaires se multiplient dans les quartiers défavorisés et en milieu rural. Elles permettent aux consommateurs les plus modestes d’accéder à un large panel de produits moyennant une faible contribution financière. Pour rester des lieux conviviaux, ouverts à tous, certaines d’entre elles pratiquent une tarification variable en fonction des moyens de chacun. Les groupements d’achats, lancés par des consommateurs, des associations ou des collectivités locales, participent de la même philosophie (lire l’encadré ci-dessous). Retrouvez le réseau des épiceries solidaires sur www.andes-france.com.

Notre avis
Il est aujourd’hui possible de manger mieux, mais aussi moins cher, sans passer par la grande distribution… à condition de s’organiser collectivement et de reconnecter les consommateurs aux producteurs, comme le proposent les magasins coopératifs.

Vrac (Vers un réseau d’achat en commun)

Depuis fin 2014, il est possible, dans les quartiers populaires de Lyon, d’acheter des produits bio à des prix défiant toute concurrence. Une gageure relevée par Vrac, association créée et coordonnée par Boris Tavernier, en partenariat avec le bailleur social Est Métropole Habitat et la fondation Abbé-Pierre. « Nous sommes partis d’un constat simple : quand on n’a pas d’argent, on n’a pas le choix. On va vers le moins cher au détriment de la qualité et de la santé. L’objectif de Vrac est de lutter contre ces inégalités », explique le fondateur. Comment ? En achetant des produits en grande quantité et en vrac, sans emballage ni marketing, il divise les tarifs par deux. Restait à convaincre les personnes concernées. « Notre argument principal était le goût. On a organisé des dégustations », raconte-t-il. Peu à peu, la machine s’est mise en route. L’association compte à présent 1 200 adhérents. Une fois par mois, un centre social de Vaulx-en-Velin se transforme en épicerie éphémère où l’on se retrouve pour récupérer ce que l’on a commandé 15 jours plus tôt : aliments frais, épicerie (miel, jus de fruits, compotes, cafés, thés, etc.), mais aussi produits d’entretien, d’hygiène et de soin. Réception des marchandises, reconditionnement… chacun participe. Le bémol : certains produits restent trop chers pour ceux qui ont besoin de l’aide alimentaire. La viabilité des systèmes d’économie solidaire dépend donc de l’appui financier d’associations caritatives et des bailleurs sociaux. Mais ça marche : Vrac a développé aujourd’hui son modèle dans de nombreuses villes de France et même à Bruxelles (www.reseauvrac.org).

Les Jardins de cocagne

Issus d’un modèle suisse, les Jardins de cocagne ont pour objectif l’accompagnement de personnes en situation précaire sur une période de 2 ans. À travers la production de légumes biologiques, distribués sous forme de paniers hebdomadaires à des adhérents consommateurs, ces structures d’insertion favorisent le retour à l’emploi, mais d’autres activités viennent, selon les opportunités locales, se greffer sur celle de la vente de paniers : animation d’un jardin pédagogique, éducation à l’environnement, création de conserveries, plateformes logistiques, traiteur, etc. Aujourd’hui, le réseau Cocagne compte 110 structures d’insertion. Informations sur www.reseaucocagne.asso.fr.

En France, 110 Jardins de cocagne œuvrent à l’insertion par la production et la vente de paniers bio.

Notre avis
Les Jardins de cocagne sont de véritables exploitations maraîchères biologiques, mais leur vocation première est l’insertion par l’économie de personnes en difficulté.

Les plateformes numériques en point relais ou en livraison

La Toile est devenue le passage obligé pour toutes les initiatives de vente locale. Pour les acteurs de ces nouveaux modes de distribution, c’est une vitrine incontournable pour se faire connaître et être vu, mais c’est aussi un excellent moyen, pour le public, de découvrir les initiatives qui se développent, parfois à proximité immédiate. Il y en a pour tous les goûts : généralistes ou spécialisées, locales, régionales ou nationales, les plateformes de vente en ligne de produits en circuit court se sont multipliées comme des petits pains… Mais certaines risquent de disparaître aussi rapidement si le succès n’est pas au rendez-vous ! Leur objectif commun : mettre en relation producteurs et consommateurs à travers un intermédiaire unique (le principe même des circuits courts). Certaines suivent un modèle de recherche de profit classique : la rémunération du service par un pourcentage prélevé sur les transactions. D’autres, dans un esprit plus éthique, se mettent au service des utilisateurs et cherchent à couvrir leurs frais de fonctionnement uniquement par des cotisations ou des droits d’accès.

Les grands réseaux

Aujourd’hui, le site Cagette.net a le vent en poupe et fait figure de modèle avec plus de 2 000 groupes revendiqués. Cette place de marché est basée sur un réseau de groupes autogérés, accueillant aussi bien des producteurs isolés que des associations ou des Amap. Le rôle de la société mère se limite à la gestion du site, à la formation des acteurs-producteurs et au contrôle du respect d’une charte très exigeante. Le concept se veut le plus neutre possible sur le plan financier, en ne prélevant aucune commission sur les transactions qui se font directement entre le producteur (ou le groupe de producteurs) et le consommateur final. Le financement de la plateforme est assuré par une cotisation forfaitaire annuelle pour les membres producteurs (à partir de 350 € HT) sans limitation de chiffre d’affaires.

Son concurrent historique, La Ruche qui dit oui, fait appel à un concept de base similaire : l’organisation du réseau autour de « ruches » animées par un organisateur indépendant. Mais les similitudes s’arrêtent là. Le site prélève une commission de 20 % sur le montant des transactions, répartie à peu près à égalité entre l’animateur et la société mère. Celle-ci obéit au développement capitalistique des start-up de l’Internet et s’appuie sur des partenaires financiers dont la principale motivation est le retour sur investissement… On est bien loin des préoccupations environnementales et écologiques des tenants des circuits courts. Avec 750 « ruches » revendiquées, le modèle semble marquer le pas. Difficile de motiver des animateurs qui ne peuvent espérer gagner que quelques centaines d’euros par mois. Le concept cherche donc un nouveau souffle en développant la livraison à domicile, voire les points de vente urbains.

Cette « ruche » est installée à La Boc, une brasserie de Perpignan.

Notre avis
Le concept de ces circuits généralistes est très séduisant et le nombre de producteurs adhérents peut sembler impressionnant mais, dans la pratique, il reste de grandes zones d’ombre, et le premier point de distribution disponible est souvent situé à plusieurs dizaines de kilomètres du consommateur. À cela s’ajoute une offre très disparate, surtout axée sur les fruits et légumes, et un peu limitée, surtout en hiver…

Les autres plateformes

Il existe aujourd’hui beaucoup d’autres plateformes numériques. Spécialisées (Poiscaille pour les produits de la mer, etc.) ou généralistes (Kelbongoo, Pourdebon avec 12 000 références et 500 producteurs, etc.), toutes butent sur les contraintes liées à la distribution des produits aux consommateurs : coût du transport (qui plombe l’empreinte carbone) ou proximité des points de collecte. Elles rivalisent d’imagination pour trouver des solutions : livraison à domicile, retrait hebdomadaire en point relais, voire création de leur propre réseau de points de distribution avec des horaires d’ouverture plus larges, en pariant sur le volume des transactions pour équilibrer les coûts de fonctionnement (Kelbongoo à Paris, etc.).

Autre solution : de nombreuses plateformes proposent des formules d’abonnement sous la forme de paniers (bio ou non) expédiés à intervalles réguliers. Pour la livraison, tous les tarifs sont au rendez-vous. La gratuité totale est souvent liée à un montant minimal d’achat (50 € par producteur pour le site Pourdebon). Pour certaines, elle est liée à un forfait ou à une zone géographique : ainsi, chez Poiscaille, la livraison en point relais est gratuite à Paris dès le premier panier, mais il faudra en commander 4 dans le reste de la France pour obtenir les mêmes conditions avantageuses…

Notre avis
Faire son marché en local et en bio sur le Web peut paraître séduisant. Mais gardons à l’esprit que rien ne remplace le contact direct avec la marchandise… Gare aux désillusions liées à la qualité, à l’état de fraîcheur ou à la manutention durant le transport, d’autant que les recours seront difficiles, voire impossibles. Attention, également, aux colis perdus, aux erreurs d’adresse et aux délais non respectés, surtout avec des denrées périssables.

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