ACTUALITÉ

Faux ongles et vernis semi-permanentsUne ribambelle d’effets sur la santé

FM

par Fabienne Maleysson

Ingrédients nocifs, risque d’allergie handicapante, contre-indications diverses… Suivre la mode actuelle en matière de manucure, c’est mettre en danger sa santé de multiples façons.

Toxique pour la reproduction. C’est le classement dont a hérité le TPO (1), un ingrédient utilisé dans divers produits pour les ongles. Au vu de ses effets potentiellement graves, il est interdit depuis le 1er septembre dernier et aucun délai d’écoulement des stocks n’est prévu. Les professionnelles n’ont plus le droit de l’utiliser et les consommatrices sont vivement encouragées à s’en débarrasser. Notre application gratuite QuelProduit note évidemment en rouge (risque significatif) les références qui en contiennent. Ce sont en particulier des vernis semi-permanents et des bases, la marque la plus représentée étant Peggy Sage, suivie de Le mini macaron.

Un vernis semi-permanent Peggy Sage et un gel polish Le mini macaron comportant du trimethylbenzoyl diphenylphosphine oxide.

Au-delà de cet ingrédient, faux ongles et vernis semi-permanents exposent leurs utilisatrices à divers risques. Depuis qu’ils sont à la mode et que des « bars à ongles » s’ouvrent à tous les coins de rue, une nouvelle pathologie s’est répandue : l’allergie aux acrylates. Ces ingrédients qui forment une grande famille sont des plastiques dont l’état physique et la viscosité peuvent être modifiés par le chauffage ou le refroidissement. Polyvalents, ils peuvent être utilisés aussi bien dans les primers (qui favorisent l’adhérence du vernis ou du faux ongle) que dans les bases ou les vernis eux-mêmes. Problème, ils sont extrêmement sensibilisants. « L’allergie aux acrylates commence à beaucoup nous inquiéter, affirme le docteur Pierre Marcant, dermatologue-allergologue au Centre hospitalier universitaire de Lille. Elle touche davantage les professionnelles, mais on voit de plus en plus de consommatrices qui achètent le matériel leur permettant de poser elles-mêmes un vernis semi-permanent ou des faux ongles. Elles courent également un risque. »

Les symptômes ? La pulpe des doigts est extrêmement irritée, avec des douleurs et des démangeaisons. « Si le contact avec l’allergène cesse, les symptômes disparaissent, mais cela prend parfois jusqu’à 1 mois », précise Pierre Marcant. Si on a recours aux services d’une professionnelle, les risques sont théoriquement moindres. Encore faut-il qu’elle soit compétente et ne déborde pas sur la peau ou les cuticules. Or, la pose de faux ongles n’est pas considérée comme un soin esthétique si elle n’est pas assortie d’une manucure. En conséquence, elle n’est pas réglementée et n’importe qui peut ouvrir une boutique spécialisée.

Allergie, inflammation, paresthésies, mycoses…

Mais le plus ennuyeux, c’est que les acrylates sont largement utilisés dans d’autres secteurs autrement plus vitaux que la beauté des ongles : la médecine et les soins dentaires. Conséquence : chez les personnes sensibilisées par un vernis ou un faux ongle, une réaction allergique peut se manifester après un passage chez le dentiste ou à l’hôpital et compromettre les soins. Du fait de leurs multiples propriétés, les acrylates sont utilisés en dentisterie aussi bien dans les résines composites (par exemple pour l’obturation d’une carie ou la correction d’un défaut de l’émail) que dans les adhésifs. En chirurgie aussi, on y a souvent recours. « Une de nos patientes a fait une allergie lors de la pose d’une prothèse du genou, raconte Pierre Marcant. Ce risque lors des soins est le problème le plus préoccupant. »

Ce n’est pas le seul. En 2016, l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) avait déjà lancé l’alerte sur les divers désagréments à craindre avec les faux ongles en particulier. Si l’on dépasse les limites de l’ongle naturel, on risque, outre l’allergie, une chute de ce dernier, une inflammation locale ou encore des paresthésies (sensibilité anormale de la peau). On peut aussi perdre son ongle lorsqu’on gratte ou qu’on arrache le postiche : la bonne méthode est de l’immerger dans du solvant ou de le limer. De plus, si mains et produits ne sont pas parfaitement nettoyés avant les manipulations, gare aux mycoses. Enfin, toujours selon l’ANSM, diverses catégories de la population devraient éviter le recours à cet ornement en vogue : les adolescentes, car leurs ongles ne sont pas à maturité ; les femmes enceintes, car l’innocuité de ces produits pour la grossesse et le développement fœtal n’est pas établie ; le personnel soignant, car des bactéries se logent facilement sous les faux ongles ; les femmes qui doivent subir une intervention chirurgicale, car cela empêche la pose au bout du doigt d’un instrument mesurant l’oxygène du sang.

Plus récemment, des chercheurs ont exposé des cellules à une lampe à UV telle que celle utilisée dans les bars à ongles et ont montré que cette irradiation provoquait des mutations semblables à celles constatées lors de la survenue d’un cancer de la peau. Or, un mélanome sous l’ongle, cela existe. Que de risques encourus simplement pour se plier à la mode !


(1) Son nom sur les listes d’ingrédients : trimethylbenzoyl diphenylphosphine oxide.

Soutenez-nous, rejoignez-nous

La force d'une association tient à ses adhérents ! Aujourd'hui plus que jamais, nous comptons sur votre soutien. Nous soutenir

image nous soutenir

Newsletter

Recevez gratuitement notre newsletter hebdomadaire ! Actus, tests, enquêtes réalisés par des experts. En savoir plus

image newsletter