ENQUÊTE
Peintures dépolluantes

Des preuves insuffisantes

La qualité de l’air intérieur est devenue un vrai sujet de santé publique. Après avoir multiplié les analyses et les alertes pour faire prendre conscience du problème, Que Choisir ne peut pas s’en plaindre. Mais les industriels ont flairé le filon commercial qui pouvait rapporter gros, et le secteur de la peinture n’y échappe pas. Dépolluer l’air du logement est un nouveau créneau porteur. Décryptage de ces peintures qui se disent « dépolluantes ».

Tout d’abord lors de notre test de peintures d’intérieur blanches, nous avons vérifié que les 4 références se présentant comme dépolluantes n’envoient pas de substances chimiques en quantité dans l’air intérieur alors qu’elles prétendent les éliminer. C’est vrai pour 3 d’entre elles, mais pas pour Colours Respirea de Castorama, particulièrement émissive 3 jours après la pose.

Ensuite, nous avons tenté d’obtenir des industriels leur procédé de dépollution. Aucun n’a accepté de nous répondre avec précision. Les peintures recourent donc à l’une ou l’autre des deux grandes techniques de dépollution qui existent sur le marché grand public : la photocatalyse et la captation chimique.

Pour la photocatalyse, qui détruit les molécules chimiques sous l’effet de la lumière, on recourt au dioxyde de titane, souvent sous forme de nanoparticules. Si l’efficacité de ce procédé est prouvée dans le traitement des effluents industriels, elle a été extrapolée aux produits grand public sans évaluation dans les conditions de vie réelles d’un logement. De plus, les nanoparticules de dioxyde de titane sont classées « cancérogène possible » et la photocatalyse peut provoquer la formation de sous-produits plus nocifs que les polluants qu’elle cherche à éliminer.

Ni l’efficacité ni l’innocuité de ce procédé ne sont démontrées dans les environnements intérieurs, ont conclu à la fois l’Observatoire de la qualité de l’air intérieur et l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie).

La captation chimique de certains polluants, à savoir la famille des aldéhydes, qui compte le redoutable formaldéhyde, est un procédé plus récent. Elle se fait par adsorption (et non absorption car il s’agit d’un phénomène de surface). Des molécules captent le formaldéhyde, qui se fixe dans la peinture. Si ce procédé semble a priori moins problématique que la photocatalyse, il est peu documenté, d’autant que les fabricants gardent jalousement leur secret industriel. Et au-delà de la nocivité ou non, se pose la question de son efficacité. Les peintures de notre sélection semblent plus proches de ce procédé que de la photocatalyse.

Les industriels gardent leurs secrets

Pour nous prononcer, nous avons demandé aux fabricants sur quelles études ils se fondaient pour afficher « peinture dépolluante » avec la mention « Efficacité prouvée ». Au vu des éléments qu’ils nous ont fournis, leurs conditions de tests sont éloignées de la réalité.

Les peintures sont exposées à un environnement nettement plus chargé en formaldéhyde que l’air intérieur de la plupart des logements. Leur efficacité, pas totale mais significative sur ces teneurs de 70, voire 100 µg/m3, ne signifie pas pour autant qu’ils seront aussi efficaces sur le formaldéhyde aux concentrations très inférieures, 20 µg/m3 en moyenne, que l’on retrouve dans les domiciles.

Ensuite, ces études sont effectuées sur une courte durée et très peu de temps après l’application, quelques jours ou quelques semaines dans le meilleur des cas. Les 6 à 7 ans d’efficacité promis par 3 peintures sont le fruit d’un calcul des fabricants. Il repose sur des données confidentielles que nous n’avons pas pu vérifier. Enfin, si les études transmises semblent montrer une absence de relargage de formaldéhyde après captation, la question des polluants secondaires n’est pas traitée. Il nous est impossible d’affirmer que la réaction chimique est complète et sans aucun risque.

En résumé, les études fournies ne permettent pas de juger de l’action dépolluante des peintures dans les conditions de vie les plus courantes, ni de leur innocuité. Quant à un test de Que Choisir sur ce volet précis, il n’a pas pu avoir lieu faute de méthode adaptée aux niveaux de formaldéhyde rencontrés dans l’habitat.

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