ACTION UFC-QUE CHOISIR
Électricité

L’UFC-Que Choisir défend devant le Conseil d’État le droit à un prix raisonnable

Pour contenir la hausse des factures d’électricité, le gouvernement a mis en place une mesure de régulation du marché permettant de faire davantage bénéficier les consommateurs de la compétitivité du parc nucléaire français. Alors que cette mesure salutaire est attaquée par plusieurs organisations syndicales d’EDF devant le Conseil d’État, l’UFC-Que Choisir intervient ce jour dans la procédure en soutien du gouvernement compte tenu des effets inflationnistes qui résulteraient de son annulation. L’association demande parallèlement au président de République de prendre toutes les mesures permettant d’écarter une potentielle explosion de 47 % des factures d’électricité des consommateurs en 2023.

Une mesure gouvernementale limitant la hausse des factures d’électricité contestée par les syndicats de salariés d’EDF

Alors que la hausse du tarif réglementé de vente aux particuliers (TRV) aurait pu atteindre 35 % TTC en 2022, le gouvernement – sous l’impulsion de la société civile et de la Commission européenne – a pris plusieurs mesures pour la limiter. Parmi elles, outre la baisse de la taxe intérieure sur la consommation finale d’électricité (passée de 22,5 €/MWh à 1 €/MWh), le gouvernement a décidé d’agir sur l’ARENH, un dispositif permettant aux concurrents d’EDF d’acheter à un prix régulé une partie de sa production nucléaire. En relevant le plafond de l’ARENH de 100 à 120 TWh, EDF doit ainsi davantage rendre accessible à ses concurrents – et par capillarité faire bénéficier à leurs clients – l’avantage compétitif du parc nucléaire par rapport aux prix sur les marchés de gros.

Les syndicats de salariés d’EDF attaquent actuellement devant le Conseil d’État les textes réglementaires précisant les modalités de ce relèvement du plafond de l’ARENH, en arguant notamment qu’il affaiblirait la situation financière d’EDF. S’il est vrai qu’EDF tirerait davantage profit de la vente de 20 TWh de sa production nucléaire sur les marchés à des cours en pleine ébullition autour de 200 €/MWh plutôt que d’en faire bénéficier les consommateurs français au prix régulé de 46,2 €/MWh, le véritable scandale réside dans le fait que les consommateurs sont privés depuis 2019 de la pleine jouissance de la rente nucléaire (1) alors qu’ils ont financé la construction des centrales, et sont ainsi artificiellement surexposés aux prix de l’électricité sur les marchés internationaux.

Une annulation de la hausse du plafond de l’ARENH pourrait entraîner un rattrapage tarifaire de 16 %

Si la faible sensibilité de ces syndicats au montant de la facture d’électricité peut s’expliquer (puisque les salariés d’EDF bénéficient de « l’avantage énergie » : gratuité de l’abonnement, fourniture d’électricité à un prix équivalent à 4 % du prix de base et exonération des taxes) (2), pour l’immense majorité des consommateurs, le prix de l’électricité constitue une préoccupation aussi forte que légitime. Et les conséquences qu’aurait pour les consommateurs une annulation du plafond de l’ARENH seraient concrètes et désastreuses. En effet, en se focalisant sur les seuls intérêts pécuniaires d’EDF, le recours de ses syndicats de salariés passe sous silence le fait qu’une telle annulation contraindrait vraisemblablement les concurrents d’EDF à augmenter leurs prix, mais que surtout les 65 % de ménages au TRV seraient également affectés, puisque le TRV est calculé de telle sorte que plus la quantité d’électricité vendue au tarif de l’ARENH est limitée, plus son prix est élevé (3).

Concrètement, si la hausse du TRV en 2022 n’avait pas été plafonnée à 4 % par le gouvernement, elle aurait atteint 20 % avec un plafond d’ARENH à 100 TWh. D’après les calculs de l’UFC-Que Choisir cette hausse aurait été réduite à 10 % avec un plafond à 120 TWh. Dès lors, annuler les textes administratifs permettant aux fournisseurs alternatifs d’avoir accès à 20 TWh supplémentaires pourrait aboutir à ce qu’un rattrapage tarifaire de 16 % soit effectué sur les factures des consommateurs en 2023 au titre du plafonnement à 4 % effectué en 2022. En effet, bien que le gouvernement se soit engagé à ne pas procéder à un tel rattrapage, le flou demeure sur l’effectivité de cette promesse (4).

Attention au scénario catastrophe en 2023 : + 47 % de hausse des factures !

Limiter le risque d’un rattrapage massif sur les factures en 2023 est d’autant plus indispensable qu’un tel rattrapage viendrait s’ajouter à une hausse des factures qui pourrait déjà être phénoménale hors rattrapage. En effet, compte tenu de la cherté actuelle de l’électricité sur les marchés de gros et de l’absence d’arguments plaidant pour une baisse tangible au cours des prochains mois, l’UFC-Que Choisir estime (5) que la hausse du tarif réglementé en 2023 pourrait faire flamber les factures des consommateurs de 32 %. Ainsi, un ménage moyen chauffé à l’électricité verrait sa facture bondir de 1 615 euros à 2 132 euros. Si en plus un rattrapage tarifaire intégral en 2023 lié au plafonnement en 2022 du TRV devait avoir lieu, c’est une facture annuelle d’électricité de 2 380 euros (+ 765 euros, soit + 47,3 %, par rapport à 2022) qui viendrait peser lourdement et indûment sur le pouvoir d’achat des consommateurs.

Soucieuse de préserver le pouvoir d’achat des consommateurs en assurant qu’ils puissent pleinement bénéficier de la compétitivité du parc nucléaire qu’ils ont financé, l’UFC-Que Choisir a donc décidé d’intervenir devant le Conseil d’État pour soutenir le bien-fondé de la décision du gouvernement d’augmenter le plafond de l’ARENH à 120 TWh en 2022.

De plus, compte tenu de l’inquiétante perspective inflationniste des factures d’électricité en 2023, l’association presse le Président de la République :

  • D’assurer que l’engagement pris par le ministre de l’Économie de ne pas faire supporter en 2023 aux consommateurs un rattrapage de factures au titre du plafonnement du TRV en 2022 soit traduit dans les faits ;
  • De prendre au plus vite l’ensemble des dispositions permettant de limiter la hausse du TRV en 2023 (augmentation du plafond de l’ARENH à 150 TWh comme le permet la loi, fin de la TVA sur les taxes…).

Mise à jour du 6 mai 2022

L'UFC-Que Choisir se félicite de la décision, rendue ce jour, du Conseil d'Etat refusant d'annuler, en référé, le relèvement du plafond de l'ARENH, ainsi que des motivations de cette décision. En effet, le Conseil d'Etat justifie sa décision en reprenant les arguments essentiels exposés par notre association dans la procédure concernant les impacts économiques qui résulteraient pour tous les consommateurs, qu'ils soient au TRV ou en offre de marché, d'une annulation des textes réglementaires encadrant la hausse du plafond de l'ARENH. La plus haute juridiction administrative a fait primer l'intérêt général sur l'intérêt particulier d'une entreprise.

Pour Alain Bazot, Président de l'UFC-Que Choisir :

"Au-delà de la reprise des arguments de l'UFC-Que Choisir pour rejeter la demande de suspension du relèvement du plafond de l'ARENH, le Conseil d'Etat a souligné le bienfondé de l'intervention de l'association dans la procédure, montrant ainsi la légitimité des consommateurs à s'impliquer dans les sujets en lien avec la régulation du marché de l'électricité. Souhaitons désormais que cette légitimité soit également reconnue par le pouvoir politique, pour que les consommateurs soient pleinement impliqués dans une indispensable refonte du marché de l'électricité visant à les préserver de l'explosion des prix de l'électricité sur les marchés internationaux".


(1) En raison du mécanisme d’écrêtement des demandes ARENH, précédemment décrit dans le détail par l’UFC-Que Choisir : https://www.quechoisir.org/action-ufc-que-choisir-candidats-a-l-election-presidentielle-engagez-vous-pour-favoriser-une-consommation-responsable-et-liberer-au-moins-15-milliards-d-euros-de-pouvoir-d-achat-n98605/. Notons que l’UFC-Que Choisir déplore l’organisation actuelle du marché de l’électricité et formule des propositions de réformes (cf. Ibid.).


(3) Cf. Ibid.


(5) En se basant sur la formule officielle de calcul du TRV, et en prenant pour hypothèse un prix moyen du produit calendaire base 2023 de 200 €/MWh d’ici à la fin de l’année (un chiffre inférieur à celui actuellement constaté), un prix de 300 €/MWh pour le produit de pointe, et un maintien des autres paramètres ayant dicté l’élaboration du TRV en 2022 (frais de réseaux, prix sur le marché de capacité, coûts commerciaux et marge d’EDF).

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