Fabienne Maleysson
Toujours trop de substances nocives
Après l’alerte que nous avons lancée en 2017 à propos des huiles minérales dans les sticks pour les lèvres, de nombreux fabricants ont revu leur copie. Mais beaucoup d’autres persistent à utiliser ces ingrédients indésirables.
Déclasser la moitié des produits testés : nous avions pris cette décision exceptionnelle lors de notre précédent test de baumes à lèvres, au vu de la présence, dans ces échantillons, d’huiles minérales et d’hydrocarbures de synthèse en trop grande quantité. Ces ingrédients, que l’on retrouve notamment sous les noms petrolatum, paraffin ou encore cera microcristallina (voir la liste complète), produisent des résidus potentiellement toxiques. Les uns sont cancérogènes, les autres peuvent engendrer des réactions inflammatoires par suite d’une accumulation dans le foie ou les ganglions lymphatiques. C’est la raison pour laquelle huiles minérales et hydrocarbures de synthèse sont interdits dans l’alimentation. Mais ils ne le sont pas dans les cosmétiques. Or, introduits dans un baume à lèvres, ils sont susceptibles d’être ingérés. Dans cette catégorie de produits, en toute logique, nous les classons, dans notre appli QuelProduit et nos tests comparatifs, comme ingrédients indésirables.
L’étude de marché préalable à notre nouveau test de baumes à lèvres nous a réservé une bonne et une mauvaise surprise. La bonne ? Depuis notre alerte de 2017, de nombreux fabricants ont décidé de se passer des substances contestées. Ils les remplacent par des composés a priori inoffensifs comme la cire d’abeille, l’huile de ricin (« castor oil » sur les emballages), le beurre de karité, etc. Aussi avons-nous pu opérer une large sélection de références sans huiles minérales ni hydrocarbures de synthèse (bios ou non, vendues en parapharmacie ou grandes surfaces, rechargeables ou non) pour les tester cette année (1).
Substances indésirables et perturbateurs endocriniens
Malheureusement, ces bonnes résolutions ne sont pas partagées par tous les industriels. Certains persistent à utiliser ces substances potentiellement nocives. Parmi les produits déclassés en 2017, certains ont disparu du marché, d’autres ont été reformulés pour exclure ces ingrédients (Avène Cold cream, Labello original) mais d’autres en renferment toujours. C’est le cas du Petit Marseillais nutrition lèvres desséchées. Pour La Roche Posay nutritic et Uriage stick lèvres hydratant, dont la composition a été amendée, on peut encore acheter l’ancienne formule sur le site de leur fabricant respectif. Chez Boiron, on ne trouve plus la même référence mais deux autres, le baume et le stick Dermoplasmine. Seul le baume contient trois de ces composés indésirables. L’exemple le plus frappant étant Carmex classique qui non content d’afficher deux de ces substances, cumule avec un perturbateur endocrinien !
Leur cas n’est pas isolé. Huiles minérales et hydrocarbures de synthèse sont toujours utilisés par un large panel de fabricants, de Neutrogena, Bioderma (Atoderm) ou Clinique (Repairwear Soin des lèvres réparation intense) à des marques bon marché comme Kiko ou Primark. Avec cette dernière marque, le risque d’ingestion est d’autant plus élevé que les baumes sont pourvus d’arômes de type alimentaire : pastèque, tarte aux cerises ou Mentos fruits rouges ! Le plus choquant ? Les références clairement orientées « enfants » comme celles de Chupa Chups aux arômes de fruits ou de Disney qui portent le nom de différents dessins animés. Leurs fabricants devraient être d’autant plus vigilants sur la composition de leurs produits.
(1) Les huiles minérales et les hydrocarbures de synthèse sont interdits dans les cosmétiques biologiques.
Gaëlle Landry
Rédactrice technique