Marie-Noëlle Delaby
Les propositions du Sénat
Suite à la série d’auditions des principaux protagonistes de l’affaire Lactalis, le Sénat rendait jeudi 5 avril un rapport avec des propositions afin d’améliorer les procédures de retrait des produits alimentaires présentant un risque.
Du 24 janvier au 21 février, le Sénat a mené des auditions auprès de la chaîne des acteurs impliqués dans le scandale Lactalis : le producteur bien sûr mais aussi les distributeurs (pharmaciens et grandes surfaces dont Carrefour, Leclerc ou encore Système U), les services chargés de la sécurité alimentaire (DGAL et DGCCRF) et, enfin, les associations de consommateurs, dont l’UFC-Que Choisir.
Ces entretiens ont permis de mettre au jour des difficultés à 3 étapes clés, pour lesquelles Alain Milon et Sophie Primas, respectivement présidents des commissions des affaires sociales et des affaires économiques ont émis des propositions :
Lors des contrôles
L’audition, le 13 février, de Patrick Dehaumont, directeur général de l'Alimentation du ministère de l'Agriculture et de l'Alimentation (DGAL), avait révélé de sévères dysfonctionnements dans la remontée des autocontrôles des fabricants aux services sanitaires. La fonte des moyens et des effectifs d’inspection que nous ne cessons de dénoncer a également été évoquée à de nombreuses reprises au cours de ces entretiens.
Le Sénat préconise donc d’augmenter les moyens dédiés aux inspections et leur fréquence, de mieux communiquer sur les contrôles pour rassurer les consommateurs et, enfin, de rendre obligatoire l’information sur les contrôles positifs dans l’environnement lorsque ceux-ci, après contre-analyse, font apparaître une situation présentant un risque pour la santé humaine.
Pour rappel, dans une allocution du 16 janvier 2018, le ministre de l’Agriculture Stéphane Travert prônait déjà un renforcement du cadre juridique autour des autocontrôles avec « l’obligation pour les entreprises de transmettre aux services de l’État les résultats des contrôles défavorables, qu’il s’agisse de contrôles sur les produits ou sur l’environnement, dès lors qu’ils peuvent avoir des conséquences néfastes sur la santé publique. Mais également une obligation de transmission par les laboratoires des résultats défavorables portant sur les produits aux services de l’État. Ceci venant s’ajouter à la disposition actuelle limitée aux épisodes avec des cas d’intoxication humaine ».
Lors de la phase d’information du public sur la procédure de rappel des produits
Quand l’affaire Lactalis a éclaté, plusieurs listes de produits au rappel, incomplètes, ont été diffusées avant qu’un document a priori exhaustif ne soit disponible, pour la plus grande exaspération des consommateurs.
Le Sénat propose de renforcer la traçabilité des produits pour favoriser une identification rapide des lots à risques par le fabricant. Il suggère également de faire figurer sur une liste unique l’intégralité des informations relatives aux produits alimentaires rappelés, les sites hébergeurs de cette liste devant l’actualiser.
Lors de l’exécution de la procédure de retrait
Lors de l’exécution matérielle de la procédure de retrait par les acteurs concernés (grande distribution, pharmacies, hôpitaux, crèches) la DGCCRF (Direction générale des fraudes) a constaté que plusieurs acteurs n’avaient pas retiré les lots incriminés des rayons. Quand certains, à l’instar de magasins Auchan et Carrefour, ont même remis en rayon des laits contaminés ramenés par les consommateurs.
Les sénateurs préconisent le blocage en caisse, notamment grâce aux codes-barres, de tout produit à retirer et de bloquer la vente des références concernées sur les sites en ligne. Mais aussi de permettre l’identification des consommateurs via leurs données de carte bancaire (en réservant cette dernière mesure aux cas de risques sanitaires les plus graves).